J'ai tout le temps faim!
BlogDe nos jours il est devenu rare de croiser des personnes qui écoutent les messages que leur envoie leur corps, que ce soit sous forme de sensations agréables ou non. C'est encore plus difficile chez les personnes qui ont passé des années à mettre en sourdine leur faim en faisant des régimes restrictifs successifs entrecoupés de périodes de craquage total. Certaines autres personnes ne sentent pas la satiété, et mangent jusqu'à ce que les casseroles soient vides, jusqu'à sentir la peau de leur ventre tellement distendue que ça en devient désagréable, mais quand ils le sentent, il est déjà trop tard.
Or, l'ère est à la "healthy" food, le "healthy lifestyle". Manger sain, bio, et vivre sainement sont plus que jamais à la mode. D'ailleurs il est aisé de trouver quantités d'articles, de recettes, de blogueurs qui parlent de toutes ces tendances food sur les réseaux sociaux. Grâce à internet, une foule d'informations est à la disposition de tous, quelle aubaine! Sauf qu'en fait, sur internet on peut trouver tout... et son contraire! Je reçois souvent en consultation des personnes perdues, submergées par ce flot de nouveautés miraculeuses qui leur permettraient de se sentir mieux, et qui en fait ont l'impression qu'elles ne peuvent plus rien manger du tout!
Forcément, quand on se restreint, on a faim. Mais cette faim peut-elle avoir d'autres causes?
Localisez votre faim
Que ressentez-vous au moment où vous dites les mots "j'ai faim"? La première chose à apprendre est de localiser votre faim. Et pour cela, je vais commencer par vous apprendre à faire la différence entre la vraie faim et ses jumelles maléfiques.
La faim, la vraie, est une réponse physiologique à un manque de carburant. Cela peut prendre un certain temps à identifier, d'une part parce que nous ne nous laissons plus le temps d'avoir faim de nos jours, et mangeons plutôt par habitude à heures fixes ou parce que c'est socialement le moment de le faire. Ses symptômes se manifestent au niveau de l'estomac, qui tiraille, gargouille et réclame le prochain repas généralement assez bruyamment.
La faim émotionnelle peut paraître similaire, mais est plus difficile à localiser. Parfois elle se manifeste au niveau du coeur, parfois au niveau de la tête. Parfois, elle peut donner une sensation de vide, mais un vide plutôt "lourd" à porter, un manque (ou parfois un trop plein) qu'on a besoin de combler, de compenser, de récompenser. Chacun est différent et ressent ce vide à sa manière, avec ses mots. A aucun moment cette faim ne fait gargouiller l'estomac, c'est ce qui peut vous aider à faire le différence.
Si vous voulez vraiment agir de façon efficace face à la faim, vous devez d'abord déterminer de quelle faim vous souffrez, afin de pouvoir y répondre avec les bons outils. Il arrive bien trop souvent que mes patients mangent pour compenser et combler une faim émotionnelle, remplissant leurs estomacs au lieu de remplir leurs coeurs.
J'ai tout le temps faim au niveau de l'estomac!
Si vous avez souvent une vraie faim il y a deux solutions: soit vous mangez trop peu et vous êtes dénutri, soit vous mangez en quantité suffisante mais de mauvaise qualité et dans ce cas vous êtes malnutri. Dans les deux cas, votre organisme vous réclame des nutriments que vous ne lui apportez pas en suffisance. Vos cellules sont de petites usines qui ont besoin de carburant pour fonctionner. Que vous mangiez trop peu ou que vous soyiez adeptes d'aliments peu intéressants nutritionnellement, il vous manque certains de ces nutriments. Or votre cerveau recevant les plaintes de ces cellules sous-alimentées, il vous envoie des signaux de faim afin de vous donner la possibilité d'ingérer les substances manquantes. Généralement, quand c'est le cas, vous vous jetez plus facilement sur une "gougouille" que sur des aliments dont vous avez besoin, et c'est pour cela que si vous ne faisiez pas attention à vous arrêter à temps, vous pourriez en manger sans fin (et sans faim)!
L'idéal est de sortir de table en étant tout juste rassasié. Chez la plupart des gens, cela correspond à la sensation d'avoir encore de la place dans l'estomac mais ne plus avoir faim. Or il est rare de voir quelqu'un sortir de table avant d'être totalement repu. Le fait de manger trop a des répercussions notamment sur le poids, mais cela accélère fortement le vieillissement des cellules. Donc pour un corps jeune et tonique, le tout est de trouver le juste équilibre entre faim et satiété. Si on dessinait une échelle de satiété allant de -5 (affamé) à +5 (trop mangé), il faudrait constamment se trouver entre -3 et +3.
J'ai des fringales entre les repas!
Certaines personnes dont l'alimentation est basée sur les produits sucrés et/ou les féculents, peuvent aussi sentir dans les deux heures qui suivent le repas, une baisse de régime qui leur donne envie de manger ou de boire une boisson sucrée. Il s'agit d'une fausse faim, causée par l'hypoglycémie réactionnelle, et cela se règle très facilement en procédant à de petites améliorations des repas. Je parle plus des hypoglycémies dans cet article.
J'ai une faim émotionnelle!
Lorsque la faim se situe ailleurs que dans l'estomac, c'est qu'il est temps que vous vous posiez la question: "quand me suis-je fait plaisir pour la dernière fois?". Vous aurez probablement soit une foule de réponses qui seront toutes alimentaires, soit très peu de souvenirs qui vous viendront à l'esprit. Or il faut savoir que le plaisir n'est pas qu'alimentaire. Au niveau cérébral, quoi qu'il arrive il est tout bonnement lié à une production de sérotonine. Et, même si cela reste le moyen qui vous vient le plus vite à l'esprit, on ne fait pas de la sérotonine qu'en mangeant! Le cerveau s'en fiche de savoir si son plaisir lui vient de la tablette de chocolat, du massage aux huiles essentielles ou du petit footing qui vous a fait tellement de bien, tant qu'il est inondé de ce neurotransmetteur.
Donc quand vous vient l'envie de compenser une émotion ou une dure journée, il faut que vous ayiez sous la main un geste "secours" que vous pouvez utiliser à la place de manger (ou boire, ou fumer, ou ...). Remplacer un geste par un autre vous permet d'éviter la frustration (qui vous demanderait encore plus de compensation) liée à la restriction.
Voici une liste non-exhaustive de gestes qui boostent la production de sérotonine:
- Faire une respiration complète consiente
- Se faire masser (trapèzes, nuque, crâne, pieds, ...)
- Masser quelqu'un
- Prendre un bon bain relaxant
- Prendre une bonne douche bien chaude
- Se passer de l'eau sur le visage
- Respirer un parfum que l'on aime (huile essentielle, fleur, ...)
- Ecouter sa chanson préférée, chanter, danser
- Faire une promenade
- Faire un tour en vélo
- Faire du sport (petit joggins, yoga, ...)
- S'aérer, contempler le ciel, un arbre, une fleur, une photo, ...
- Visualiser de bons souvenirs
- Faire une séance de méditation
- Pratiquer la gratitude
- Sourire, rire (regarder une vidéo de votre humoriste préféré par exemple)
- Embrasser, étreindre (un partenaire, un animal, ...)
- Jouer avec les enfants
- ...
En pratique, choisissez un ou plusieurs gestes dans la liste et pratiquez-les chaque jour en profitant à fond de ce moment que vous vous octroyez. Vous le méritez! Lorsque le besoin de compensation pointera le bout de son nez plus tard, c'est tout naturellement que vous vous dirigerez vers cette nouvelle pratique saine plutôt que vers le frigo.
Si l'envie de manger persiste, mangez avec plaisir! Sans culpabilité! Mais en appliquant la méditation alimentaire. Mangez l'aliment en y portant 100% de votre attention, en le savourant, comme si vous le dégustiez à l'aveugle et que vous deviez en définir toutes les caractéristiques organoleptiques. La satisfaction en sera plus grande, et vous (re)découvrirez le vrai plaisir gustatif.
J'ai trop d'occasions de manger!
La canette de soda habituelle qui accompagne le sandwich, l'alcool social des personnes qui dînent avec les clients, l'association vacances = excès,... Autant d'arguments donnés par les patients de tout diététicien qui se respecte et qui ne doivent absolument jamais rester sans réponse!
Les aliments sont notre carburant, ils nous profitent au niveau nutritionnel et, dans l'idéal, aussi au niveau gustatif. Boire un soda un jour où on en a très envie n'aura pas le même impact qu'en boire un tous les jours par habitude sans y réfléchir.
Il en va du même des récompenses: prendre un verre de vin après le travail, cela ne pose aucun problème si c'est parce que le vin va vous goûter, que vous en avez très envie. Par contre si vous le prenez parce que vous avez eu une journée difficile, vous risquez d'ancrer une mauvaise habitude. Et les jours où votre journée sera à nouveau mauvaise, vous aurez le réflexe "vin", vu que votre cerveau aura enregistré que le vin vous détend, vous apporte de la sérotonine. D'un verre, vous passerez à deux, puis à trois. Les kilos et la fatigue liée à la surcharge de votre foie suivront de près.
Autre exemple: le restaurant. Manger au resto est souvent synonyme de plats riches qu'on ne mangerait pas à la maison. Or il existe toutes sortes de restos, toutes sortes de plats, et dans tous les établissements que j'ai fréquenté, on ne m'a jamais refusé une portion de légumes supplémentaire. J'ai plusieurs patients qui vont au restaurant plus de trois fois semaine et qui perdent du poids! Parce qu'ils ont compris qu'il n'est pas indispensable d'exagérer quand on mange à l'extérieur, et que le plaisir n'est pas dans la quantité mais dans la qualité. C'est le même principe pour les vacances. Vous ne vous amuserez pas mieux à la Côte d'Azur si vous mangez des fast foods que si vous mangez des plats à base de légumes ;)
Mais la crainte la plus répandue est celle du souper, que je conseille très souvent frugal. "Mais c'est le seul moment où on se retrouve en famille!". Je trouve cela très triste que la seule chose qu'une famille arrive à faire ensemble soit un repas! Surtout que les repas avec les enfants sont très souvent des repas pris dans le stress du "finis ton assiette", "j'aime pas ça", etc. Alors que ce temps pourrait être mis à profit pour jouer, se parler, profiter et s'aimer! De plus, je pratique une nutrition qui suit le principe du petit déjeuner de rois, du repas de midi de prince et du souper de pauvre. Je m'applique à faire en sorte que mes patients aient mangé suffisamment sur la journée pour n'avoir que très peu (voire pas du tout) faim le soir. Or j'ai pas mal de patientes qui n'ont pas faim mais se forcent à manger le soir pour ces raisons! J'en ai d'autres qui par contre s'attablent avec la famille afin de profiter du moment ensemble, mais ne ressentent pas le besoin de manger la même chose, et se contentent d'une petite assiette ou d'un bol de soupe et ça leur va très bien! Tout dépend de l'état d'esprit dans lequel vous êtes. Mais après tout, tout le monde sait profiter d'un bon resto! Et au resto, il est rare que toute la famille mange le même plat... ni la même portion!